9. Les tramezzini de Florence





Florence est la première ville étrangère que j’ai découverte dans ce qui me sembla être un jour souverain. Lycéenne, j’étais dans une classe spécialisée en arts plastiques et histoire de l’art et notre professeur avait organisé un séjour à Florence pour nous faire découvrir la renaissance italienne. 

Tout m’enchanta et tout était propice à l’enchantement; la beauté ambiante qui happait mon regard à chaque détour de rues et de places, l’impression d’entrer de plain-pied dans un musée animé, les pivoines qui gonflaient de couleurs tous les jardins, la lumière noire et dorée sur l’Arno. La Florence tant rêvée dans les oeuvres de Boticelli et de Fra Angelico laissait place à une Firenze bien réelle qui me comblait tout autant avec ses magasins de mode, ses terrasses de café, son animation du Ponte Vecchio et la merveilleuse liberté de pouvoir se promener à notre guise.

Tout m’apparaissait nouveau, beau, chic et incroyablement exotique. Ce terme peut sembler excessif pour désigner l'Italie, mais pour moi, comme pour la plupart des membres de notre groupe de lycéens, c’était mon premier voyage hors de France et ma méconnaissance de la culture quotidienne italienne rendait chaque détail découvert étonnant et séduisant. 
Au cours de nos balades nous avions remarqué dans les bars des présentoirs de petits sandwichs particulièrement attirants. 
Habituée aux classiques «jambon-beurre-baguette» de nos bistrots français -avec leur variante saucisson et pâté- les tramezzini venaient d’entrer dans le palmarès de mes futurs souvenirs gustatifs. Deux tranches de pain de mie triangulaire et sans croûte renfermaient tout un choix de garnitures raffinées: mortadelle, artichaut, jambon cru, asperges et oeufs, pancetta, champignons, bresaola, mozarella, speck, gorgonzola, légumes marinés ... Tout était merveilleusement délicieux et incroyablement nouveau. Malgré ma répugnance à l'évocation de mon âge, il faut bien me résigner à évoquer que ces souvenirs ont presque quarante ans ... et qu’alors; pancetta, bresaola, mozarella, speck ou gorgonzola ne faisaient pas encore partie de nos habitudes culinaires. Les plateaux de tramezzini bien rangés et aux propositions toutes plus alléchantes les unes que les autres nous permettaient de partir à l'assaut d’une gastronomie inconnue qui de plus était accessible à nos touts petits porte-monnaies. 

Je garde plus particulièrement le souvenir d’un tramezzino au speck et artichaut qui est pour moi la quintessence d’une cuisine de comptoir remarquablement simple et goûteuse. Mais ce petit tramezzino au speck et artichaut a aussi le goût de mon premier printemps florentin et du souffle de mon coeur qui avait décidé de battre sur un rythme débutant. 



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